CARTER MATTHEWS ▸ Alysha Nett

“Viens te perdre dans le creux de mes reins” qu'elle murmure, un murmure, un soupir et un baiser, puis deux. Elle, poupée de chiffon, elle se perd dans les limbes du désir, un soupir, puis deux. Elle se perd encore et encore, elle s'oublie. Elle oublie sa vie de merde, la perte de celui qu'elle aime,  celui qu'elle désire du plus profond de son coeur, le rejet de ses parents depuis que sa demi-soeur a pointé le bout de son nez, quelques mois après son arrivée, à cause d'un malheureux déni de grossesse. Elle est partie du cocon familial à ses dix-huit ans, elle a laissé derrière elle, une famille unie, soudée mais qui ne comptait pas sur elle, qui ne s'occupait quasiment pas d'elle. Elle fume, elle  boit, et vous connaissez tous la suite, le fameux triangle équilatéral. Si elle avait pu changer d'identité, elle l'aurait fait pour ne plus rien avoir à faire avec la famille Matthews, elle ne se serait plus fait appelé Carter, mais Alice comme son livre préféré, Alice c'est beau, c'est frais, ça respire la joie de vivre, mais Carter, elle, la joie de vivre elle ne connaît pas. Elle préfère descendre en enfer et fréquentait Lucifer, Satan. Elle ne supporte pas l'injustice, alors elle aide les gens qui sont dans le besoin, même si avec son boulot de strip-teaseuse elle a un peu de mal à concilier, boulot, études et associations. Puis vient l'histoire dont toutes les petites filles rêvent, le prince charmant et Cendrillon, Carter et Morgan c'est un peu pareil. Il est le prince, elle est Cendrillon. Elle ne vit que pour ça, la justice et l'amour. Même si pour elle, son amour se résume à se perdre dans les draps de parfaits inconnus, les plaisirs charnels. Elle ne veut pas s'attacher à quelqu'un, la souffrance très peu pour elle, elle a peur de souffrir alors elle est partie. Elle l'a abandonné, lâchement en prétextant qu'il n'avait pas besoin d'elle, qu'elle allait lui attirer des problèmes, trop de problèmes. Mais il ne sait pas que c'est parce qu'elle est amoureuse de lui. Elle l'aime à s'en crever le coeur mais il n'en sait rien. Elle vit pour ça, pour être désirée et faire désirer. Elle joue avec ça, quand elle danse, quand la musique éclate dans la salle obscure, elle danse. Elle retire un vêtement, puis deux, puis elle se retrouve la, à moitié nue devant des inconnus, mais c'est sa vie, quand elle fait ça, elle se sent vivre, revivre comme un phoenix qui renaît de ses cendres. Comme si, toute sa vie était un bordel monstre, le plaisir qu'elle éprouve, elle l'a longtemps cherché. Longtemps, elle a été à la quête du frisson, de la sensation de bien-être, et il faut dire qu'ici à Paris, elle l'a trouvé. Elle a trouvé un sens à sa vie, un sens à sa misérable vie qu'elle s'applique à détruire petit à petit avec l'alcool, la drogue. Sans limite, elle est. Elle est incontrôlable, incompréhensible, sauf quand tu creuses, mais si tu creuses trop, elle se renferme et elle t'envoie te faire voir, te faire foutre comme elle le dit si bien. Sa vie, elle la contrôle tant bien que mal, mais elle tente de la contrôler du mieux qu'elle peut. Quand elle foule les rues de la ville des amoureux, elle sait que sa vie, elle a commencé le jour où son avion s'est posé sur la tarmac de Charles de Gaulle.