(I) Il n'a aucun souvenir de ses parents. Il n'y a eu que son frère, depuis toujours et il n'y aura que son frère à jamais.
(II) Il est incapable de sociabiliser. Il ne sait pas parler en public, n'est pas à l'aise avec les gens. Il passe plus de temps à se cacher dans l'ombre de la nuit qu'à essayer d'aller vers les autres. Après tout il n'est rien de plus qu'un monstre. C'est son frère qui le lui a appris. Et personne n'aime les monstres c'est bien connu.
(III) Raphaël adore arpenter le Paris nocturne. Il aime se perdre sur les pavés trempés et se shooter aux merveilles architecturales de la ville. Il aime quand les néons des enseignes brillent de mille feux au point d'en aveugler les étoiles. Raphaël il aime Paris. Surtout la nuit.
(IV) Il se sent seul souvent. Il n'a pas d'amis, il n'a personne et ce n'est pas la présence de son aîné qui comble ce vide. Plus le temps passe et plus la solitude l'asphyxie, mais Raphaël n'arrive pas. Conditionné à croire certaines choses.
(V) C'est une bête sauvage. Un animal. Il ne connaît pas les conventions, il n'aime pas ça. Il est brutal, laisse cette part d'ombre s'exprimer continuellement. Dans une autre vie il était loup qui courait à travers les forets de sapins. Peut-être qu'il était la bête du Gévaudan. Raphaël est un animal maudit à vivre comme un humain.
(VI) Il est recouvert de tatouages. Une façon de marquer sur son corps les stigmates de sa vie. Les épreuves qu'il endure, seul ou avec son frère. Les découvertes. Sa part humaine parfois. Son encre a une signification. Cicatrices qui le parsèment et essayent de le guérir de son mal être.
(VII) Il n'est pas dépressif, il n'est pas malheureux. Raphaël est juste touché par la grâce noir des enfers. Il est sombre, il préfère le noir au blanc. Il pense ne rien mériter de plus. Mais il ressent des choses. De l'amour. De l'envie. Du désir. Il n'est juste pas fait pour cette société. Sociopathe ou quelque chose dans le genre. Il ne connaît pas le terme exact. Il n'en sait rien Raphaël. Il sait juste ce que son frère lui a dit en l'élevant.
(VIII) Raphaël aime l'art. Tous les arts. C'est un moyen fantastique pour s'exprimer quand on ne sait pas comment bien parler. Alors il dessine. Il dessine beaucoup. Des carnets remplis de croquis bizarres, de corps décharnés ou de corps qui s'aiment. Des croquis de cathédrales. Des croquis d'animaux. De nature. De rêve étrange avec des couleurs brûlantes. Il joue un peu de musique aussi. Un petit peu seulement, mais ses mélodies sont souvent mélancolique et son frère n'aime pas les entendre.
(IX) Il n'est pas un monstre. Une part de lui commence à se réveiller. A se rebeller. Une part de lui commence à refuser l'éducation reçue et les pensées qu'on a forcées dans son esprit. Une part de Raphaël s'éveille à vouloir être autre chose. A vouloir autre chose. A être plus. Plus grand, plus beau. Plus fort. Mais le chemin est long.
(X) Il lit énormément. Beaucoup. Pendant des années il n'avait que ça à faire. S'instruire, lire des histoires et s'imaginer être pour une fois le héros et pas ce foutu loup qui se fait étriper à la fin. Il aurait aimé être le héros d'un roman de Dumas ou de Hugo. Il aurait aimé être un alignement de mots noirs sur des pages blanches. Mais il est juste. Lui.
(XI) Raphaël rêve d'une bohémienne qui danse à la nuit tombée. Raphaël il rêve d'elle comme d'une déesse qui glisserait ses doigts dans sa barbe soignée. La voir danser et se perdre contre lui. L'aimer. Lui montrer la voie. Raphaël il rêve d'une bohémienne. Mais. Ce n'est qu'un rêve.
(XII) Un jour il se déchaînera. Il sera pleinement incontrôlable. Il ne sait pas ce qu'il fera vraiment et s'il s'en ira, mais Raphaël se donnera. Non. Il volera son droit à la vie et à la liberté. Un jour il dira, en hurlant du haut des toits, au monde d'aller se faire foutre, car lui aussi a le droit. D'être qui il veut sur cette putain de planète.