Elle était belle. La première fois que Josh avait parlé à June, il lui avait dit qu'elle méritait mieux que la bière bon marché qu'ils servaient à cette fête. Et le chapitre de sa vie avait commencé comme ça.
De leur histoire, il conserve des souvenirs précis, comme ce restaurant japonais près de chez ses parents où ils s'étaient barrés sans payés parce que c'était cool. Il se rappelle de ses jupes qui volaient quand ils courraient. Il se rappelle son corps qu'il avait aimé, ses yeux qui le regardaient, son cou nu ou qui portait des bijoux. Il l'avait présenté à son père, à son frère, à sa mère, dans cet ordre et même si personne ne semblait comprendre, au moins tout le monde avait fait des efforts et ils voyaient que Josh souriait. Ils s'étaient moqués de lui en disant que l'amour lui était tombé dessus. C'était un peu ça en fait.
Quand il regardait June, il comprenait ces gens qui veulent se marier et avoir une grande maison, des enfants. Bon ça lui était vite passé.
Elle était cheloue June quand même. Des fois elle pleurait au réveil. Il lui avait promis de la rendre heureuse. Viens on se barre qu'il avait dit. Viens on prend les clés une valise pour deux les restes de lasagne c'est bon quand c'est froid et on se tire de New York. Il s'était souvenu de ça sous la Tour Eiffel. Viens on se barre étaient leurs mots préférés. Ils étaient partis, il lui avait montré toutes les merveilles qu'il connaissait, il lui avait présenté Lauren qui organisait les meilleurs soirées de la Cote Ouest, il était allé à Harvard voir son frère avec elle.
Putain il l'avait aimé si fort June Marple. Il l'avait aimé qu'il lui tenait la main dans la rue. Il avait trouvé sa raison de vivre, il savait qu'il sortait du lit juste pour aller préparer du thé pour que June soit aussi contente de se lever.
Mais Josh n'aimait pas les contraintes. Il lui avait dit lâche tes médocs chérie l'eau fraîche c'est le seul remède et puis ça craint y aura de l'herbe à la soirée de Lauren. Il aurait du savoir. Son amie l'avait mis en garde, fais gaffe Josh elle est chelou ta copine. Il s'était énervé contre Lauren. Josh ne s'énervait jamais avant. Il ne s'énerve pas dans les bouchons ni contre la caissière qui est lente et surement pas contre Lauren. Mais il s'énervait pour June.
Son frère lui balança un truc sur ses émotions à fleur de peau, un truc trop intelligent pour lui semble-t-il, il n'en avait rien eu à foutre. Il l'avait envoyé se faire mettre. Sa mère avait parlé à June de bébés et de mariage, son père d'héritage, ils s'étaient encore barrés avant la fin du dîner.
Josh et June dormaient parfois dans la voiture ou dans des hôtels quatre étoiles, selon le moment et leurs humeurs. Josh adorait les cheveux de June et ses seins aussi. Il ne se lassait jamais de la regarder. Il était amoureux fou d'elle. Et puis il y avait eu ce mail. June lui avait parlé de son frère, de leur père, de Paris, d'une boulangerie aussi. Alors Paris, la ville de la belle, de la lumière, qu'il avait détesté à l'arrivée. Des gens, du bruit, une foule pressée, une horreur, mais June.
Il l'a vu que ça n'allait pas. Ils ont regardé Titanic ensemble et il a compris qu'il était Rose qui remonte sur le bateau pour rester avec Jack jusqu'à la fin quoi qu'il puisse se passer. Rose et Jack sur une plate forme qui tangue parce que June va mal et qu'il ne peut rien faire. Enfin ce n'est pas tout à fait vrai, il pourrait faire mieux, il pourrait être meilleur, sauf qu'il ne pense pas qu'elle soit soignable. Les médicaments ne lui servent pas, ça peut la détruire plus que ça ne la soigne, alors il la supplie de ne pas prendre les comprimés, surtout pas s'ils vont dans un restaurant français pour boire du vin. Ils courent, ils tournent, la vie avec June ressemble à un manège, il adore la voir sourire sauf que les sourires de June se font rares. La plupart du temps elle crache, elle hurle, il déteste la voir comme ça alors il crie aussi parce qu'elle l'énerve. Il accuse Paris, il prend sa veste et se tire, elle le rattrape, il revient. Il est piégé, il le sait, mais il l'aime alors il lui promet de l'aider. Il va jeter les bouteilles dans un centre de tri, plus d'alcool avec tes médocs chérie.
Et puis il y a eut cette nuit. Elle a tenté de le tuer. Elle lui a foutu des couteaux dans le ventre. June a tenté de tuer Josh. Il a crié, il a supplié, il a saigné, il a vu son couteau dans sa main. Il a voulu le tuer pendant qu'il dormait et quelque part il songe qu'il est heureux d'en avoir réchapper. June n'aurait jamais pu survivre sans lui. Elle n'aurait jamais pu vivre avec l'idée de l'avoir tué pour de bon. Il n'a rien dit aux policiers. Jamais il n'a dit le nom de June. C'était une fille monsieur mais je vais bien je n'ai pas l'intention de porter plainte disait-il dans un français approximatif. Il en garde des cicatrices et le chapitre trois de sa vie s'est refermé.
June est partie. Il ne l'a plus jamais revu. Il ne sait pas où elle est. Il est resté à Paris parce qu'il n'a plus rien à faire ailleurs. Il attend. Il ne compte pas rester toute sa vie. Il aime bien les Champs Elysées. Il y a de la lumière comme dans les yeux de June. Elle lui manque.