Un, Solal, il n'a jamais vraiment connu son père. Souvent absent, toujours très con. Il se souvient des coups, des cris, des pleurs de sa mère qui n'arrivait plus à faire semblant. Il se souvient de la violence comme emprunte dans sa chair et dans son âme.
Deux, son père, il a toujours été porté sur la bouteille. Un triste sort dont Solal est le digne héritier. Il lève le coude bien trop souvent. Il en plaisante, sa canette à la main, avant d'avaler sa gorgée et ses frustrations. Il se détruit à petit feu. Et il le sait.
Trois, si jeune et le visage déjà marqué par l'expérience et les difficultés. Il en a vu des choses, Solal. Trop de choses. Envolée l'innocence. Il ne croit plus en rien. Dieu est mort.
Quatre, il a toujours été considéré comme lent et stupide, à l'école. Le bonnet d'âne. Des résultats médiocres, une estime de soi inexistante. Et pourtant, il en a dans la tête, le petit. Mais il déteste le système. C'est d'ailleurs pour ça qu'il a arrêté les études à seize ans.
Cinq, il aime lire plus que tout. C'est son échappatoire. En revanche, il est incapable d'écrire. Il aime les mots, mais les mots le fuient.
Six, sa mère est morte il y a quelques années. Il a dû gérer son deuil, son père absent, les factures, sa jeunesse anéantie et sa petite soeur. Son trésor aux grands yeux tristes.
Sept, il fait des boulots, par-ci, par-là. Eboueur, déménageur, peintre en bâtiment. Mais c'est l'illégal qui paye les factures. L'herbe et ce qui tombe du camion.
Huit, il a la même bande de potes depuis toujours. Solar est loyal, en amitié, comme en amour.
Neuf, produit de Barbès, il aime la mixité, le bruit, les couleurs. Il déteste les gens snobs. Les bobos trop fermés d'esprit.
Dix, Il dit n'en avoir rien à foutre, mais dans le fond, le regard des autres compte. Ce n'est pas pour rien qu'il essaye toujours d'être bien sapé.
Onze, plus blanc que métisse avec un prénom qui ne sonne pas exotique, il a toujours réussi à se sortir des pires galères. Pas comme certains de ses amis. Le racisme, le fléau de Paname. Et ça le dégoute plus que tout.
Douze, il aime les femmes plus que tout. Et si parfois il se perd en vulgarité, il essaye toujours de les honorer.